article paru dans la marseillaise.
« Quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver »… Une phrase de sinistre écho, attribuée à une fourchette de dirigeants nazis, au temps des autodafé sur les grandes places de Berlin.
On n’en est pas encore là mais la manifestation du Front national, organisée par Stéphane Ravier, le maire des 13-14, et les élus régionaux FN, contre une exposition à la Friche de la Belle de Mai, charriait des odeurs plus que nauséabondes.
Une centaine de militants plus qu’excités se sont rendus devant l’hôtel de Région pour huer Michel Vauzelle et les élus de gauche pour leur soutien à cet espace culturel qui a laissé s’exprimer deux artistes allemands, à l’invitation d’un autre artiste, Pakito Bolino, qui est aujourd’hui l’objet de menaces de mort.
Une culture officielle au service d’une idéologie
Un bel avant-goût de la conception culturelle du Front national qui ne jure que par une expression hérissée de barbelés et d’artistes au service de l’idéologie d’extrême droite qu’ils défendent.
« Nous allons en finir avec cette clique de bobos qui monopolisent l’art », éructait le petit maître à penser des 13-14, chauffant ses ouailles qui lançaient dans la foulée : « Jack Lang et Frédéric Mitterand, la potence ! Pierre Bergé, le bûcher ! La corde pour les pédophiles ! » Ah, le rétablissement de la peine de mort, en voilà une belle conquête qui les démange.
Au grand jour et sans masque, ces militants FN ou des groupuscules satellites qui lui collent à la peau, malgré le semblant de respectabilité auquel prétend le parti de Marine Le Pen. Et les visages haineux, pas plus que l’arrogance des réponses aux questions des journalistes ne mentaient pas.
« Vous verrez, quand nous serons au pouvoir, prophétise un jeune homme de vingt ans. Vous n’écrirez plus, ne publierez plus ce que bon vous semble. Il y aura des instances chargées de vous contrôler. » C’est que la presse, même la moins récalcitrante, n’a pas plus droit de citer que le cinéma, la littérature, les tableaux ou les photographies non estampillés Front national.
« Vous défendez les pires instincts de l’humanité », poursuit sans rire le même jeune homme d’un ton martial. « D’ailleurs, la télévision n’est plus qu’aux mains de juifs homosexuels, poursuit un de ses aînés qui n’a rien renié de l’héritage du fondateur du Front national que les dirigeants de ce parti prétendent pourtant avoir mis hors d’état de nuire. Et Stéphane Ravier de fustiger « le silence assourdissant qui a présidé à cette odieuse exposition ». Dont la tenue a été rendue possible par la complicité « de la Région, du Département et de la mairie de Marseille. Seuls Marion Maréchal et moi-même ont osé élever la voix. »
En finir avec tout lien social
Une mairie vers laquelle se sont dirigés, d’un pas conquérant, la quelque centaine de « manifestants » où le maire des 13-14 devait resservir le même discours. Pour en finir avec « la dérive de nos rois décadents qui font régler la note » de leurs vices « par les Français ». Un discours dont il commence à appliquer les grandes lignes dans les arrondissements qu’il dirige en coupant subventions aux associations qu’il juge indésirables. Comme par hasard celles qui essaient de maintenir l’existence d’un lien social au sein des cités ou une activité culturelle pour les jeunes. Ce qu’ont bien compris les habitants des Flamants ou de la Busserine qui sont entrés en résistance. Des cités où il a bien du mal à mettre les pieds.
« Gaudin pédophile », scandé par les godillots du Front national, un parti qui n’en est plus à un procès pour diffamation près. à la Région, on n’a pas estimé nécessaire d’appeler à la résistance contre le parti d’extrême droite. Seuls les élus communistes ont fait connaître leur attachement à la liberté de création en déployant la toile de Courbet, « L’Origine du monde » sous leurs fenêtres.
Gérard Lanux