Portrait de Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, en visite à Gap ce jeudi 15 mars à partir de 11h30 à la gare, à 12h30 place Alsace Lorraine, et 14h30 au square Dunant, pour soutenir les salarié-e-s de la SNCF, des EHPAD et des retraités.
La mutation de la République sociale en régime libéral oblige toutes les forces de représentation populaire à se remettre en question. La représentation syndicale est fortement impactée par le jeu du « diviser pour mieux déstructurer » qu’imposent à marche forcée les gouvernements successifs depuis le début des années 2000. La casse du Code du travail aurait, il y a quelques décennies, fait tomber n’importe quel pouvoir. 2016 et 2017 restent deux années funestes pendant lesquelles les classes populaires, ouvrières vont, en désordre de bataille, subir les coups les plus durs en termes de régression sans parvenir à arrêter le rouleau compresseur du pouvoir financier. Ainsi, le précariat s’impose et devient normatif sous couvert de « modernité » alors même qu’il fut à l’origine de la naissance du mouvement social au début du 20ème siècle.
C’est dans cette atmosphère des « jours mauvais » que Philippe Martinez 57 ans, technicien métallurgiste de métier, est élu, le 03 février 2015, secrétaire générale de la CGT. C’est un inconnu du grand public, mais pas du grand patronat. Technicien chez Renault, il prend en 2008 la tête de la Fédération des travailleurs de la métallurgie (FTM-CGT) et négocie la restructuration de la filière automobile contre un MEDEF et un gouvernement plus acquis au bien-être de l’actionnaire qu’au devenir de l’ouvrier.
Parce que c’est dans ce monde que nous vivons désormais : Le travailleur est un produit de placement, une variable d’ajustement, qui doit être calibré en termes de « coût » pour remplir des poches rentières et engraisser le marché de l’emploi précaire. S’il dit « non ! » le travailleur devient un « preneur d’otages » des autres travailleurs qui réclamerait, non pas de la justice sociale, mais une rançon au détriment des plus malheureux que lui. Un nouveau langage s’est installé dans lequel celui qui propose sa force de travail, sa sueur, ses heures passées, se voit considéré comme un voleur de riches, un spoliateur de rentier, s’il exige une rémunération, des conditions à la hauteur de sa valeur. C’est le monde à l’envers. Il devient normal d’être flexible, mobile, pliable, jetable, à moindres frais. C’est l’indépassable « réforme » dans un pays qui n’a jamais été aussi riche, à laquelle il faut se plier, courber l’échine, faire profil bas… Très bas !.
Philippe Martinez dénote. Il n’est pas « moderne ». Loin de l’image lisse de son prédécesseur, mais également du réformisme de ses collègues de la CFDT, son regard à la Lino Ventura en impose. Oui le grand patronat le connaît et grince déjà ses dents de requin lorsqu’il découvre que c’est à lui qu’il va désormais avoir à faire. D’entrée les attaques fusent. On ne lui passe rien. Du procès en illégitimité de son élection jusqu’à « l’archaïsme de ses propositions », le MEDEF et ses amis s’en donnent à cœur joie pour tenter de le déstabiliser avant même qu’il se présente. L’homme est solide. Il conduit, malgré les divisions, les attaques politiques à sa droite, mais aussi à sa gauche, la démobilisation des travailleurs précaires qui n’en peuvent plus, se désespèrent, une bataille contre la casse du Code du travail digne des grandes dates du mouvement social. Au milieu d’un bouillon d’inculture gouvernemental, d’un débat complexifié à souhait par les classes dirigeantes pour que le petit peuple s’y perde… Philippe Martinez rétablit le « bon sens syndical ». Oui les libéraux gagneront cette bataille, mais ils échouent à la victoire totale qu’ils croyaient certaine et même légitime. Le moustachu bourru, surnommé par ses amis « Pépito » ou « Super Mario » joue un rôle majeur dans cet échec de la finance et redonne à l’action syndicale une raison de penser que tout n’est plus aussi joué d’avance que le pouvoir semblait croire… Ou faire croire.
Sa parole est fluide. Calme. Lorsqu’il arrive dans une assemblée, une manifestation, on le sent porter en lui l’aura des travailleurs. C’est une qualité rare et qui nous repose un peu des infatigables (et fatigants) égocentrés, des sauveurs suprêmes, qui ne font briller qu’eux-mêmes. À une journaliste qui lui demande s’il est « normal » que des gens défendent le droit d’un emploi à vie, il répond aussi simplement « n’est-ce pas normal d’avoir le droit de vouloir un emploi à vie ? » ça nous change des circonlocutions habituelles qui nous démontrent qu’x+y = a-b sur la fiche de paie et que c’est pour ça que les gens vivent mieux : Parce qu’ils vivent moins bien.
Nul doute que dans la bataille du rail qui s’engage, le secrétaire général de la CGT est l’homme de la situation. Il l’a d’ailleurs bien compris et au-delà du rail, il sait qu’il ne s’agit pas d’une simple réforme d’un statut, mais bien d’un bouleversement radical d’une société où il devient normal qu’un chef d’État, sans rire, prétende qu’en déshabillant Paul, Jacques finira par trouver juste d’être à poil.
Leo Artaud
Rendez-vous jeudi 15 mars à 11h30 : gare SNCF de Gap. Place Alsace-Lorraine à 12h30 et 14h30 au square Henri Dunant.
Comme beaucoup qui s’intéressent à l’avenir de la gauche dans ce pays et scrute le moindre frémissement fédérateur , sinon unitaire, pour construire un rapport de force contre la politique de Macron et cie, j’ai suivi le discours de JL Mélenchon à Montargis, dans le Loiret, où le leader des « insoumis » était venu soutenir une candidature de division de la gauche locale à l’occasion d’une énième élection législative partielle… Eh bien, je suis atterré par son « dégagisme » tous azimuts qui aboutit à renforcer l’abstention électorale massive des milieux populaires qu’il qualifie de « grève civique » (sic) !!!! Le même, qui n’y voit apparemment aucune contradiction , n’en affirme pas moins grandiloquent, qu’il veut « changer le monde par le vote et non par le bâton ou le fusil (resic) et que les »urnes sont notre barricade » ( reresic) ???Les dernières consultations électorales ont pourtant suffisamment montré que « le dégagisme » , nourrit , outre l’abstention, le vote populiste d’extrême -droite et permet aux forces de droite de conserver leur influence électorale au détriment d’une gauche divisée et de la FI qui a perdu toutes les élections législatives partielles depuis les élections législatives de juin 2017…