Comment j’ai fait Mai 68 ! (#2 Sexuelle sera la révolution…)

 C’est l’une des histoires les plus drôles de ma vie. J’ai 50 ans en 2018 et je suis monté sur les barricades au printemps de 1968. Au moment de la fermeture de la fac de Nanterre, le 28 mars, j’ai 4 mois et 3 jours et c’est là que commence mon histoire politique.

Nicole a 20 ans ! En 1965, elle n’est pas encore majeure et les convenances, héritées d’un autre âge, d’une autre nécessité, entrent en collision frontale avec le réel. Les baby-boomers ont l’âge d’avoir des enfants, la guerre paraît loin, et Mitterrand met de Gaulle en ballotage. Nicole devient une jeune mère, mais aux yeux de son père elle est d’abord inconvenante et sera priée d’aller « inconvener » hors de sa vue. Mais si seulement il n’y avait que les yeux de son père… S’il ne s’agissait que d’une incompréhension générationnelle… Passer l’orage, la gifle peut-être, et des larmes et des cris et au bout des peurs toujours la même danse… l’amour finit par l’emporter. Ce père, cette mère, n’ont pas survécu aux horreurs de la guerre sans être bouleversés, eux aussi, dans leurs certitudes héritées.  Être une jeune fille mère à 20 ans en 1965 hors mariage dans un milieu modeste est surtout, avant tout, le problème du regard de la société. De sa part la plus terrifiée à l’idée que rien ne redeviendra plus jamais comme « avant ». Nicole a 20 ans alors elle s’en fout un petit peu des convenances. Elle fera avec les conséquences tout en nourrissant un idéal féministe qui devra arracher le droit juridique de l’égalité des sexes.

1964 Les nuits d’une demoiselle-Colette Renard

21 ans plutôt, dans un gouvernement de résistance, Fernand Grenier membre de l’assemblée consultative du CFLN et représentant le Parti communiste français, dépose un amendement donnant le droit de vote aux femmes en France. De ce nouveau droit en découle un autre : l’éligibilité des femmes. Josette Guénin et Odette Roux seront les premières élues des élections municipales au printemps de 1945. Bien des arrières-pensées politiciennes vont parsemer et parfois pourrir le débat de cette égalité en droit. Le mâle français ne s’est donc pas réveillé en conscience d’un oubli un beau matin. Mais qu’importe… Ou presque ! La victoire est là… Ou presque ! Les femmes du peuple ouvrier vont devoir s’allier avec celles de la bourgeoisie progressiste pour obtenir en 1946 la fin du « salaire féminin », en 1956 la fondation de la « maternité heureuse » qui deviendra en 1960 le planning familial et en 1965 le droit d’avoir une profession sans l’autorisation du mari. Il faut attendre 1970 pour la loi Neurwith sur le droit à la contraception et sa dépénalisation et pour que la notion d’autorité parentale remplace « l’autorité paternelle ».

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1938-Louise Weisse-La femme nouvelle​

Si le conservatisme est politiquement à droite sur l’échiquier politique, en revanche il est diffus dans la réalité sociologique. Voir ses filles se trémousser sur le déhanchement du jeune King Elvis était déjà dur à supporter (et en cachette… Madame aussi se trémoussait sous son tablier fleuri de mère au foyer accomplie), mais si en plus il fallait considérer qu’elles seraient l’égal de l’homme en droit, ça faisait beaucoup pour le pauvre époux perdant sa virile autorité d’autorité. Mais il n’avait pas encore perçu tout à fait que cette libération sexuelle était aussi celle de ses fils. Et même la sienne.

1977-Simone de Beauvoir parle, notamment, du « Deuxième sexe »

Simone a eu beau dire et Jean-Paul évité de la contredire, le chemin de l’égalité est encore loin d’être achevé en 2018 et est semé d’embûches imprévisibles. Quant à Freud, il serait ravi d’apprendre que ce combat est celui de la révolution sexuelle ! Cette révolution qui s’affirme par le prisme du progrès social et qui se traduira, avant la jurisprudence, par les conséquences démographiques. La reproduction n’est plus la seule raison d’être des relations amoureuses et la sociologie familiale va s’en trouver bouleversée. La femme nouvelle veut sa part de droit au plaisir et n’être plus soumise à un devoir de maternité. Le poète aurait pu écrire « Le féminisme sera l’avenir de l’homme ».  

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Nicole s’est finalement mariée par amour. Et elle se remariera un jour par amour. En 1967 elle mettra un deuxième enfant au monde parce qu’elle aime les enfants. Elle travaille parce que c’est son choix, la garantie de son indépendance. Elle porte des pantalons, ou des mini-jupes style Courrège… « C’est une femme libérée »… Ou presque !

1964-La bague aux doigts-Marie Laforêt :

La suite la semaine prochaine.

Leo Artaud

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