UNE ÉNORME MOBILISATION
(crédit photo pour cet article Julien Royer, merci à lui pour ces superbes clichés !)
Ce cinq décembre 2019 à Gap une marée humaine historique entoure le rond-point de l’Europe. L’imposant cortège fédère près de trois mille personnes… le 6 et le 7, c’est la rue de la Préfecture qui était occupée avant d’être délogée manu-militari. Le 7 un cortège improvisé de près de 250 personnes déambulait dans les rues de la vieille ville. Le 10, une nouvelle manifestation était organisée Le jeudi 12 rebelote mais pas 10 de der… Malgré un climat tendu après l’arrestation de deux manifestants, dont une adolescente et finalement relâchés, la Capitale sociale restait mobilisée.
L’intersyndicale CGT, SUD, Solidaires, FO, FSU rejointe par les organisations des eaux et forêts, de l’environnement fait le plein. Des citoyens et beaucoup de salariés du privé étayent aussi la mobilisation. Un imposant contingent de gilets jaunes avance aux côtés de militants libertaires.
Au cœur de la mobilisation le bruit sourd des débats s’égaye de la musique des sifflets. Ce dernier est amplifié par le son grave des klaxons des routiers et automobilistes, bloqués en un long bouchon, paralysant l’artère principale de la capitale douce… Pèle-mêle, le cri spartiate de ralliement « aahou ! aaahou ! » des gilets jaunes se mêle aux roulements de tambour. De tous horizons les slogans fusent « Pas touche à nos caisses de retraite ! » où « la retraite par points on n’en veut pas ! » « C’est la grève générale qui fait peur au capital ». Des revendications percutantes comme « Non, non, non aux fonds de pension ! » répondent au « Travail, Retraite, Education c’est nous qui travaillons ! C’est nous qui décidons ! » sortent déterminés des gorges, d’opposants très remontés contre une politique qui veut tout démonter.
RETRAITES PAR RÉPARTITION : UNE INDISPENSABLE BASE SOCIÉTALE
En creux, la réforme des retraites constitue une préoccupation majeure en tant que fondement du modèle social Français. Croisé devant la gare Stéphane Payan cheminot porte-parole de la CGT abonde en ce sens. :
« Parce qu’aujourd’hui est un temps fort, la première journée d’action est interprofessionnelle puisque on n’est pas que des cheminots et c’est quand même un point important. qu’on essayait d’avoir depuis longtemps.
Aujourd’hui y’a une journée d’action de convergence, pour l’ensemble des salariés concernés par ce fameux système à points. Pour la CGT il est très clair. Il ’y a pas de négociation possible sur ce sujet-là ! On est contre le système par points. On est pour le système par répartition. Il n’est pas négociable. Il n’y a pas de discutions sur le fond de la réforme. On a décidé de se sortir du jeu, parce qu’on ne veut pas négocier sur des quignons de pain ! On ne veut pas rentrer dans des discutions qui seraient uniquement corporatistes.
Aujourd’hui le système par répartition est un des piliers de la nation, comme la sécurité sociale. Il ne faut pas y toucher ! ’on peut faire évoluer, car effectivement il y a des injustices… Il ya énormément de salariés qui aujourd’hui n’ont pas les mêmes droits. Ce qu’on dit est qu’il faut tirer les gens vers le haut, pas vers le bas.
Effectivement il y a différents régimes : il y en a quarante-deux. Il est important qu’on prenne en compte chaque régime, et qu’on fasse évoluer les droits. Pourquoi on dit ça ? Parce que le régime par répartition c’est un pilier. On ne peut pas y toucher !
Au gré des crises, des gouvernements personne ne peut y mettre la main dedans. Mais si on rentre un régime par points en fonction de crises, des gouvernements, chacun dira la sienne. On dira « y’a pas assez dans les caisses… On vous réduit vos pensions. Et on vous réduit vos droits ! »
Aujourd’hui effectivement le système par répartition il faut le faire évoluer parce qu’il y a des corporations mal prises en compte.. On peut parler des agriculteurs, des femmes. On peut parler de pas mal de secteurs où effectivement il faut rétablir ou augmenter les droits.
Il y a aussi des choses à dire sur la façon dont le gouvernement mettra en place ce régime par points. Le régime par points c’est aussi faire rentrer de la capitalisation. C’est-à-dire que chacun, individuellement, à un moment donné, va être obligé de se définir sur ce choix. Soit je prends un système assuranciel, soit boursier, soit je capitalise comme je veux pour augmenter mon pouvoir d’achat, en tant que retraité.
Aujourd’hui notre système à nous fait que quand on cotise personne ne peut y mettre la main dedans. On ne peut pas y toucher ! C’est ce qu’il faut préserver… Parce qu’en France tout le monde regarde le pays. On a un beau pays ! Il faut le défendre. On a inscrit des choses qui sont des piliers. Il ne faut pas y toucher ! J’insiste sur ce sujet-là ! Parce que c’est des droits et qu’on a tous ensemble.
Aujourd’hui on essaie de faire entrer les gens dans des faux débats. Les cheminots défendent le système qu’ils ont et la RATP (NRLD : Régie Autonome des Transports Parisiens). On essaie de diviser les salariés hstoire de dire que le système par points sera plus juste, parce que pas égalitaire. Ce sont des menteurs ! Il faut se le dire tout de suite. Puisque il n’y a rien d’égalitaire dans un système par points !
Quand on rentre dans les discutions, un policier, un cheminot, une infirmière, un maçon ont des différences. Donc pourquoi il existe quarante-deux régimes ? Parce qu’on prend en compte leurs différences. Il y avait des différences sur le départ à la retraite, sur la prise en compte de la pénibilité. Pour les routiers ça a été pris en compte à une époque.
Mais on veut aujourd’hui tout remettre en cause. Ces différences-là existent toujours ! (Lorsque le gouvernement dit que)Le système par points sera plus juste que le système par répartition, bien au contraire par ce que dans les hospitalières et chez les fonctionnaires depuis six, sept ans on a gelé le point. On a touché à ces systèmes-là ! Les français l’ont bien compris. C’est pour ça qu’aujourd’hui on est sur un temps fort, une mobilisation importante. Elle n’est pas que cheminote ! Elle n’est pas que RATP ! Ce n’est pas ça qu’il faut dire.
En plus de l’ensemble des salariés, des gilets jaunes y’ a de l’interprofessionnel. L’UD (NRLD : Union Départementale) est là. Les hospitalières sont en grève. Y’a des routiers. Pas mal de gens du privé ont dû prendre une journée de RTT, pour être dans la manifestation. Parce que tout le monde ne peut pas être en grève ! Tout le monde ne peut pas faire comme il veut… Voilà ce qu’il faut se dire. On a vraiment besoin de se parler.
Et d’insister sur un point : C’est que le système par répartition on peut le faire évoluer, l’améliorer, mais il faut qu’on garde les formes. Il faut qu’on les préserve.
Autre sujet que l’on voulait aborder, important. Puisque c’est ce que l’on vit… A la CGT on est contre le principe même de ce changement de régime. Donc automatiquement des fois on nous dit : « Vous ne voulez pas discuter » Non ! I y a certains sujets sur lesquels on ne veut pas parler ! Parce qu’on ne veut pas rentrer dans le jeu du gouvernement, dans cette philosophie-là.
Moi on ne m’a pas prouvé que c’était plus juste. ce qu’ils (voudraient) mettre en place. C’est pour pouvoir ramasser plus… Aujourd’hui le système de retraite consigne les caisses où il y a de l’argent, en cas de coup dur. Tout le monde le sait… Ça a été mis en place sous le gouvernement Jospin dans les années deux mille. I y a de l’argent mis de côté pour permettre aux régimes, si problème, de pouvoir y toucher.
On rentre un peu dans l’aspect technique là. Mais il faut quand même se dire une chose :Dans l’ensemble des entreprises, on a augmenté les salaires qui sont soumis à des cotisations pour permettre de financer le système des retraites, la sécurité sociale et le reste. On crée des déficits si vous en voulez… On l’a vu avec les hospitalières. Elles ont eu une prime. C’est honteux ! Pourquoi une prime ? Parce qu’avoir une augmentation de salaire régulait le problème des retraites, de la sécurité sociale. C’est ça qu’il faut dire aux gens. Aujourd’hui on n’augmente plus les salaires, on donne des primes aux gens… Pour éviter et pour casser les systèmes solidaires. On est pour la solidarité. Et on va se battre pour elle ! »
DU SYSTEME PAR REPARTITION AU REGIME PAR POINTS
Selon le système actuel chaque citoyen cotise selon ses moyens. En retour il reçoit selon ses besoins. Tout euro sera réellement reversé à la personne cotisant à son départ en retraite. Ce principe universaliste, égalitaire et solidaire constitue le socle de garanties sociales justes aux futurs retraités (source syndicale). A ce titre le niveau des pensions est garanti. Dans ses critères toutes les périodes non travaillées de la vie sont prises en compte (chômage, maternité, arrêts maladie…).
Par opposition le régime par points est tout sauf égalitaire puisqu’il génère un arasement et une marchandisation à un terme X. Bien que fortement ressemblant au système actuel il diffère sur beaucoup de principes… Une troublante supercherie a été mise en route : Non garanti, le montant de la future pension s’appuie sur un calcul entre le nombre de points acquis, leur valeur variable multipliée par le nombre d’années travaillées. Puis un choix de capitalisation en bourse où par le biais d’un système assuranciel s’imposera a la population. Contrairement au régime historique il exclut du calcul les périodes de vie non travaillées. Par voie de conséquence les femmes aux carrières souvent incomplètes, les employés précaires (saisonniers, intérimaires…) et les privés d’emploi seront sérieusement lésés financièrement, faute d’avoir assez cotisé au fil de leur vie. Pour eux le risque de déclassement social se superpose aux situations de pauvreté, triste sort à éviter pour une vieillesse digne…
UNE REFORME VECTRICE DE MENACES SOUS-JACENTES
La question se pose en termes de projet gouvernemental envisageant la privatisation cachée de la sécurité sociale. Par le biais de casses sociales déguisées en « évolutions » « Jupiter et sa clique libérale » s’attaquent insidieusement aux conquis sociaux du CNR … A la manière d’un serpent de mer, le pouvoir en place prépare sournoisement son projet, à l’insu des citoyens. Telle la grenouille immergée progressivement de l’eau froide vers le liquide tiède puis brûlant, la population est ainsi conditionnée…
Perfide en sa communication ce gouvernement libéral brouille les lignes directrices de sa destructrice réforme. Il joue ainsi insidieusement à un jeu de poker menteur avec notre droit fondamental, celui d’une retraite digne et égalitaire pour tous… Pas sûr que la population ne voie pas au travers de son éventail de cartes faussées. D’autant plus que la partie ne fait que commencer !
Prochains rendez-vous :
mardi 17 à 14 h 00 devant la Préfecture
Pascale ESCALLIER
Journaliste citoyenne
à noter: Mardi 17: à 12h00 casse-croûte commun et à 14h00 l’hymne des femmes chantée par Nous toutes 05 et départ de la manif