« Préparons la sortie de la crise sanitaire… » par Etienne Adam

La gestion néolibérale de l’emploi, nocive pour des dizaines de milliers de personnes, devient incontrôlable en période de crise. La crise sanitaire le met en évidence. Gérable en période « normale », ce système de libre marché capitaliste du travail, la liberté d’entreprendre, ne peut plus répondre qu’en excluant rapidement et massivement un nombre colossal de l’emploi : quand des millions de personnes supplémentaires vont être impactées, celles et ceux qui prônaient le chômage et la précarité commencent à s’interroger : si le tout pour l’entreprise mis en œuvre ces dernières années (ou ces derniers quinquennats) n’était pas la réponse ? A gauche le « bénéfice d’inventaire » sur la gouvernance de Hollande et sa loi travail se fait jour pour une option de capitalisme régulé.  

Dans les rangs de la macronie, qui a mis sans retenue L’État au service des grands groupes l’inquiétude gagnerait-elle aussi ? Dans la droite ligne du discours apologétique de Macron sur notre modèle social, Pénicaud annonce sur BFM le report de l’application au 1er septembre des dispositions de sa réforme prévues au 1er avril : elles consistaient en un changement à la baisse du mode de calcul des allocations et devaient compléter les mesures réduisant depuis novembre l’accès à l’indemnisation des chômeur.euses en contrat court.

Dans le même temps Pénicaud, qui a tout fait pour rendre plus facile les licenciements, s’adresse aujourd’hui aux patrons de manière totalement contraire ; les licenciements ne sont plus obligation vitale pour les entreprises : « Si vous êtes en difficulté d’activité économique, ne licenciez pas », dit-elle aujourd’hui. 

Nous ne pouvons que nous féliciter de la mise en cause des politiques d’emploi par celle qui les a mises en place : bien sûr, elle nous donne raison pour avoir dit depuis des années qu’il faut mettre fin au chômage et à la précarité.

Son nouveau discours ne deviendra crédible qu’accompagné des mesures suivantes :

  • suspension sine die des mesures d’Avril et de novembre
  • suspension de l’application de la loi « choisir son avenir professionnel » en particulier de celles qui aggravent contrôle et sanctions
  • suspension immédiate des procédures de contrôle et de sanctions en cours : fin des suppressions temporaires des droits et des récupérations des indus (sauf les poursuites pénales pour les vrais fraudeurs)
  • arrêt immédiat des actions de reconditionnement des soi-disant « permittent.es », profiteurs dont on veut changer le comportement ; mettre fin aux contrats avec les boites privées mandatées pour cela.

Bien entendu il ne s’agit pas de geler le fonctionnement de l’assurance chômage sur les conventions MEDEF- CFDT mais de répondre aux catastrophes sociales annoncées. Mais aussi de préparer la voie à une sécurisation des parcours professionnel qui donne un vrai droit à l‘emploi et à la rémunération en étendant ce droit au pseudo-indépendants dépendants. Aujourd’hui on découvre que la crainte du chômage, les bas salaires sont des obstacles au confinement nécessaire pour freiner la diffusion du virus : il va falloir payer des gens à ne rien faire. Le coût des mesures d’urgence antichômage (en plus des mesures d’économies citées plus haut : chômage partiel étendu aux particuliers employeurs, fonds d’indemnisation pour les indépendants …) pose autrement la question du financement : celui-ci est possible tout comme il est possible de rémunérer des salariées qui ne travaillent pas à condition d’utiliser la solidarité collective : restaurer un niveau de salaire et de cotisations à la protection sociale (l’égalité réelle entre femmes et hommes en premier). Cette solidarité collective ne peut financer que si nous sommes capables de faire contribuer ceux qui au bout de la chaîne profitent des richesses produites dans leur sous-traitance. 

Ceci suppose de réduire drastiquement le pouvoir des actionnaires décideurs du pouvoir sur la production : du plus simple à des réformes plus fortes… 

Il serait indécent que des pillages des cotisations se poursuivent. Il faut que les exonérations des cotisations sociales, que l’État a cessé de rembourser à la Sécurité sociale en 2019, soient payées, car elles servent de justification, mensongère, sur « le déficit » de la Sécurité sociale ; le plus simple est d’imposer un impôt exceptionnel en prenant sur les dividendes et les fonds de placement des grands groupes, car une part de leurs profits viennent des salaires très bas imposés aux « entreprises de main d’œuvre ». Mécanisme facile : on paie trop mal ces salarié.e.s ; leurs patrons ont des exonérations de cotisations ; et l’Etat remboursait en prenant sur les impôts… Il faut que ces messieurs-dames du patronat et des grandes banques et assurances remboursent ! 

Il est injustifiable que les hauts cadres ne paient pas en proportion de leurs revenus « salariaux ». Pas de plafonnement de cotisations au-dessus de 10.000€/mois. Pas de retraites-chapeaux exonérées de 80% de cotisations sur leurs « revenus salariaux ». 

Pour se faire accepter en temps de crise, le Président a repris nos idées, qu’il combat depuis des années : « il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer note alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie au fond à d’autres est une folie ». Voilà de justes principes ! Quand on gouverne, on en prend les moyens. Mettons dans le débat public un objectif pour le moyen terme la mise sur pied d’une telle solidarité mais aussi parallèlement les développements d’activités socialement et écologiquement utiles hors de la marchandisation et du pouvoir des actionnaires.

Ensemble doit proposer à ses partenaires pour un bloc politico-social une initiative sans tarder sur cette question centrale pour nombre de personnes. Des assemblées populaires pour construire un tel projet peuvent s’appuyer sur les associations et syndicats de chômeur mais aussi sur des secteurs directement touchés par les conséquences du chômage, de la précarité et du sous-emploi. Dans la période d’inquiétude et de morosité il est temps d’ouvrir une perspective d’espoir.

Étienne Adam 

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